Respecter son rythme
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Lorsque mon fils allait à l’école maternelle, il avait la possibilité (comme tous les enfants de ce cycle) de venir en classe dans le créneau de 8h à 9h, si bien que je le laissais dormir tout son soul et il se réveillait naturellement et dans le bon timing. J’avais conservé cette habitude de le laisser se réveiller à son rythme lorsqu’il est entré en classe préparatoire (CP). Mais la tranche horaire était plus étroite : la cloche sonnait à 8h15. Au-delà, il était en retard.
Bien sûr, mes enfants étaient couchés tôt de sorte qu’ils dorment leur quota d’heures et se réveillent en forme le lendemain. Je leur expliquais aussi les conséquences de leurs actes (« Vous pouvez tout faire dans la vie mais attention aux conséquences de vos actes. Réfléchissez avant d’agir. Vous pouvez désobéir, la conséquence est que vous vous ferez gronder. Vous pouvez faire un gâteau tout seul mais vous devez remettre la cuisine en état. Si vous faites tomber du lait, je ne me fâche pas, vous nettoyez »). Puis je les laissais faire (dans les limites de leur sécurité, of course).
Un jour, alors que j’accompagnais mon fils à l’école parce qu’il était en retard et avait peur de se faire gronder par la maîtresse, je toquais à la porte de sa classe et la maîtresse vint ouvrir. Elle nous rejoignit dans le couloir et s’adressa à mon fils : « hé bien N., tu es encore en retard, tu n’arrives pas à te réveiller ? » puis se tourna vers moi, me regarda et ajouta : « Ou bien est-ce ta mère qui a du mal à sortir du lit… » Je n’étais pas particulièrement à l’aise devant sa remarque mais je m’étais contentée de lui sourire, malgré mon envie diffuse de lui expliquer. J’avais estimé que je n’avais rien à justifier et je l’avais laissée avec sa question en suspens. Après tout, je n’avais rien à me reprocher et, vis-à-vis de mon fils, je ne voulais pas expliquer qu’il gérait à son rythme. Et puis, son insinuation n’était pas une vraie question et n’appelait donc pas de réponse de ma part.
Mon fils avait été soulagé que je ne raconte pas notre vie à sa maîtresse. Et il l’avait trouvée « pas gentille d’avoir accusé sa maman ». (Il découvrait une forme d’injustice et un début du sens des responsabilités).
Respecter ses goûts
Plus tard, lorsqu’il était en CE2 (huit ans environ), mon fils ne trouvait pas son bonnet habituel avant d’aller à l’école. Sa grande sœur, par défi, lui proposa sa cagoule rose fuchsia, que son père lui avait ramenée du Canada et qu’elle refusait de porter (« trop la honte ! »). Il la prit aussitôt et l’enfila (« j’suis cap' »). Que dis-je, il exigea de la porter !
Imaginez une cagoule rose fluo destinée à être portée sous un casque de ski ou de motard, c’est-à-dire une cagoule extra plate qui vous fait un « crâne d’œuf », et tout-à-fait rose fluo. J’étais quelque peu mal à l’aise à l’idée qu’il aille à l’école ainsi, puis je m’étais raisonnée : « après tout, s’il est content de la porter, pourquoi l’en empêcher ? » J’avais quand même pris soin de lui expliquer que peut-être se moquerait-on de lui et je craignais qu’il soit blessé (voire traumatisé ?! J’exagère à peine). Alors je le préparais à savoir répliquer pour se défendre.
De plus, je m’inquiétais de l’image que j’allais donner – une mère indigne (gloups… prendre sur soi). (je passe sous silence le fait que son père, par la suite, m’est « tombé » dessus par mail interposé pour me faire la morale sur la mauvaise mère que j’étais et ce qu’allait penser l’unique école de notre ville !)
Mon fils est allé à l’école ainsi couvert. Et tout s’est bien passé. Du moins, il a su se défendre lorsqu’il a essuyé les quolibets de ses copains : « Oh la fille ! », « oh le martien ! »
Cette cagoule rose fluo lui a fait une réputation – une excellente réputation. En fait, il était très fier d’être différent et, par la suite, dans notre petite ville, ses amis et d’autres personnes qu’il ne connaissait pas (moi non plus) le saluaient : « Salut N. ! » ou « Yo ! Tchô ! »
Il l’a portée plusieurs jours puis s’est lassé. Jusqu’à ce qu’il décide de porter autre chose.
Respecter ses tentatives
« Cette autre chose » se trouvait à la Foire Européenne à Strasbourg alors que nous déambulions dans les allées du « Village mondial ». Mon fils tomba en arrêt devant un stand de vêtements chinois, subjugué par les kimonos, costumes, robes et autre vêtements, tous plus chamarrés les uns que les autres. Il voulut absolument enfiler un ensemble pantalon-veste à col Mao brodé d’un énorme dragon doré. Je le laissais essayer en me disant qu’il sera bien temps de le dissuader par la suite, si jamais il le voulait…
Il sortit de la cabine d’essayage et se précipita vers le miroir (avant que d’autres n’occupent la place). Je guettais sa réaction. Il prenait le temps de se regarder, de face, de côté, de dos. Il s’admirait. Avec joie. Son visage se fendait d’un immense sourire et son regard pétillait… Il rayonnait tellement de plaisir que j’ai eu du mal à casser cette belle énergie. Je pouvais difficilement lui dire que c’est un vêtement « importable » en ville.
Tout en l’observant se passer le plat de la main sur les manches, puis lisser le tissu des jambes de pantalon avec délectation, je cogitais : « Après tout, c’est du 100% coton, ça a l’air solide. Et puis… c’est vrai que ça lui va bien. Et puis… ça pourra toujours servir de déguisement ou de pyjama ». Et le prix était correct. Alors va pour l’achat.
Il était tellement heureux qu’il l’a gardé sur lui le reste de la journée, par dessus ses short et T-shirt d’été portés ce jour-là. Et, dès le lendemain, il s’en est revêtu pour aller à l’école. Oups. Là encore, j’ai dû prendre sur moi : « bon, s’il est content, je ne vais pas lui gâcher son plaisir. Je ne vais pas lui transmettre mes complexes et mes craintes ». Je l’ai tout de même briefé en cas de moqueries. Et il est parti guilleret.
Le soir-même, sa sœur lui demande :
– Alors ? On t’a pas fait des remarques ?
– Oui. On m’a traité de p’tit Chinois.
– Et alors ?
– Ben alors rien, dit-il dans un haussement d’épaule, l’air de se demander pourquoi sa sœur s’inquiète.
Bref, rien de plus normal. Il est bien dans sa peau. Et moi aussi.
Respecter Autrui
Récemment, alors qu’il est collégien (12 ans), il ressort de sa commode cet ensemble couleur Bordeaux avec cette broderie particulière. Il décide de le remettre (il est tellement large qu’il rentre encore dedans). Aïe, me dis-je, il est resté sur ses bons souvenirs d’école. Que va-t-il se passer au collège ? Ne risque-t-il pas de perdre sa belle assurance et sa confiance en lui ?
Je le laisse néanmoins (bien sûr !) partir au collège ainsi habillé. Il est tranquille et serein, toujours aussi à l’aise dans son « uniforme », alors autant m’abstenir de lui communiquer mes craintes !
En fin de journée, de retour à la maison, sa sœur goguenarde lui demande :
– Alors… on t’a fait des remarques ?
– Ouais. A peine.
– Genre… ?
– Oh, on m’a traité de p’tit Chinois, comme d’hab’.
– Et t’as répondu quoi ?
– Ben que eux, c’étaient des p’tits Français et qu’ils changeaient jamais. Ah ! la prof d’Arts plastiques a trouvé mes vêtements originaux. Et comme la classe se payait ma tête, elle a rajouté que ça m’allait bien.
– Tout va bien alors ?
– Oui. Mais j’ai plus trop envie de le porter…
– Ah ? (mon cœur maternel se contracte)
– …Parce que l’élastique est distendu et que le pantalon tient plus à la taille, c’est pénible.
– Aaaah ! (mon cœur maternel se décontracte)
Bref, tout est normal. Il est toujours aussi bien dans sa peau.
Se respecter soi-même
J’ai constaté que, bien souvent, nous n’acceptons autrui dans sa différence – ses rythmes, ses goûts, ses tentatives, sa personne – qu’aussi loin que nous nous acceptons nous-mêmes. Les limites que nous imposons à autrui sont bien souvent celles que nous nous infligeons d’abord à nous-mêmes.
Nous limitons la liberté d’action d’autrui (lorsque nous disposons de ce pouvoir) parce que ses actes nous font peur. Parce que ces agissement nous confrontent à nos propres limites.
Il me semble qu’à part le véritable altruisme, la vraie générosité de cœur, personne ne s’inquiète véritablement pour personne (je sais que j’en fais bondir plus d’uns/plus d’unes : « comment peut-elle affirmer une chose pareille, moi qui me décarcasse pour toute ma famille et qui m’inquiète pour son bien-être ? »)
Nous sommes surtout pétris de nos peurs, de nos croyances, de nos leurres, que nous transmettons à travers nos façons d’être et de faire.
Je vous renvoie au processus du Nouveau Paradigme : Être –> Avoir –> Faire.
Rappelez-vous que vous n’agissez toujours qu’à partir de Qui vous êtes. Vous faites en fonction de Qui vous êtes. Si vous manifestez de la peur pour quelqu’un, c’est d’abord parce que la peur vous habite, indépendamment de l’Autre. Si si. Observez-vous et vous constaterez.
Et que constatez-vous ?
- Pour qui et pour quoi avez-vous peur ?
- Qu’en est-il de l’écoute de votre Enfant Intérieur, ce facétieux qui a envie de « se lâcher » ?
- Ecoutez-vous vos élans, ceux qui vous donnent envie d’aller de l’avant ?
- Et si vous « transgressiez » quelques-unes de vos habitudes, juste pour voir ?
S’aimer soi-même
Si vous ressentez ces petits moments d’inquiétude, de préoccupation (souvent sans objet tangible), ces peurs sournoises, ne brimez pas votre entourage en croyant vous protéger vous-mêmes, ne le restreignez pas dans ses élans pour préserver votre propre sécurité (croyez-vous). Faites un arrêt sur image, observez ce que vous ressentez, sans vous juger, sans vous condamner. Acceptez ce qui est. Respirez profondément, encore et encore.
Et récupérez cette énergie pour votre bien-être.
Si vous manquez d’idées pour respecter davantage vos élans, rappelez-vous : si vous êtes critiques, envieux ou jaloux des « libertés » prises par autrui, c’est que vous avez sous les yeux l’exemple de ce que vous aimeriez faire vous-mêmes. La vie vous fait un cadeau en vous montrant l’exemple : profitez-en !
Je vous souhaite le meilleur 🙂
Site / blog : www.etreproactif.com
Roman : « toi ou la vraie vie«
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